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> fontière linguistique flamande
dlarchet
posté 05/11/2006 à 00:49
Message #1


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From: "J-Yves Vandamme"
Sent: Tuesday, October 09, 2001 1:05 PM
[rech-59] limite linguistique flamand
..... Lille est en Flandre, Dunkerque aussi, mais d'après ce que j'ai pu lire, avant à Dunkerque (ou dans l'arrière-pays)
on parlait le flamand.
A Lille également ?
Parlait-on flamand dans toute la Flandre.
Quelle était la limite linguistique ?
Quelqu'un a-t-il des informations à ce sujet ?



[rech-59] Re : limite linguistique flamande
Quand Louis XIV est arrivé à Lille en 1667, on y parlait flamand.
Ci-dessous une toute petite page d'histoire, bonne lecture !

Extrait du livre « La Kermesse du Diable » d'Annie Sanerot-Degroote
(Introduction du livre)

« Les Flandres, années 1657 à 1677...
En ce milieu du XVIIe siècle, l'ensemble des dix-sept provinces composant les Pays-Bas s'est fissuré. Au Nord, sept
sont acquises au protestantisme. Elles se sont révoltées contre l'Espagne, et ont créé la république des Provinces-
Unies. Celles du Sud (futures Belgique et Flandre française) sont demeurées fidèles au roi catholique d'Espagne.
Ce sont les Pays-Bas espagnols.
S'administrer en toute indépendance (l'Espagne est loin), être maître chez soi, sont les privilèges auxquels sont
attachés les bourgeois de Lille et du Plat Pays flamand.
En France, le jeune Louis XIV a épousé l'infante Marie-Thérèse, fille du roi d'Espagne. A la mort de celui-ci en 1665,
Louis XIV prétend récupérer l'héritage de sa femme, et sans déclaration de guerre, en mai 1667, il entre en Flandre.
En août, Lille est cernée. La garnison lilloise résiste dix-sept jours et capitule le 28 août 1667.
L'invasion des troupes françaises est alors à l'origine d'une grave épidémie de peste. Un dixième de la population
lilloise y trouvera la mort, et la peste ne disparaîtra que grâce à des mesures draconiennes.
Le traité de paix d'Aix-la-Chapelle est signé en mai 1668. Désormais Lille est française, mais une grande partie du
Plat Pays reste espagnole, et ce jusqu'au traité de Nimègue en 1678.
En 1672, Louis XIV déclenche la guerre contre la Hollande.
Il faudra attendre 1713, pour que les frontières de la France deviennent celles d'aujourd'hui.
Avec sa fâcheuse habitude d'augmenter les impôts, d'exercer de sévères contrôles sur l'économie, et de créer des
barrières douanières, Louis XIV est impopulaire. Sa politique expansionniste entraîne pillages et famines. Il soumet
à ses lois nombre de corporations. Ecrire ou chanter en patois est désormais considéré comme un acte subversif.
Toute « libre pensée » est hérétique. La censure est virulente.
Avant l'annexion à la France, en 1667, les Flamands se sentaient enfin «flamands et espagnols », on leur demande
brutalement de se sentir «| françois ». Cela mettra un certain temps, puisque, en 1682, Vauban s'exclamera « Ce
pays n'est pas encore désespagnolé. »
Au XVIIe siècle, on quitte le Moyen Age pour entrer dans ce que l'on a appelé les «Temps modernes». Ce passage
ne se fait pas sans heurt, ni douleur. La Flandre baroque, héritière de Charles Quint, résiste encore à la France
classique, dominée par un pouvoir absolutiste.
Pour lutter contre la Réforme protestante, l'Eglise catholique lance une offensive de normalisation religieuse : la
Contre-Réforme. Les ordres fleurissent. Il y a regain de ferveur, et réactivation de la chasse aux sorcières. De
nombreux bûchers sont érigés, vers l'an 1657. »

From: "Jean FREMAUX"
Sent: Tuesday, October 09, 2001 10:44 PM
Re: [rech-59] limite linguistique flamande

Si vous voulez approfondir la question de l'histoire de la langue flamande dans le Nord, permettez moi de vous
conseiller la lecture extraordinairement documentée (notamment le chapitre sur la Flandre) du livre d'Emmanuel LE
ROY LADURIE sur l'Histoire de France des Régions au Seuil.
Si je peux très abréger, le flamand a été parlé dans les arrondissements de Dunkerque et d'Hazebrouck, et du côté
de Gravelines. Actuellement il ne le serait plus que du côté de Bergues sur la frontière belge.
A Lille on parlait le picard, mais on dit toujours Lille en Flandres.



From: "Dancoine"
Sent: Tuesday, October 09, 2001 11:32 PM
Re: [rech-59] Re : limite linguistique flamande

Si Dunkerque et Lille sont dans le même département, l'histoire nous montre que ces deux villes ont une histoire très
différente.
C'est pourquoi je me permets de vous raconter l'histoire de notre département du Nord, de la Gaule Belgique à son
annexion par Louis XiV.
Résumer quelques 1700 ans d'histoire en quelques pages n'est pas forcément facile et j'espère que nos éminents
historiens ne m'en voudront pas si je fais quelques raccourcis.

En tout cas, au vu des nombreuses guerres et invasions subies par notre région, vous comprendrez que nous avons
beaucoup de chances d'être là car nos ancêtres devaient vraiment avoir la "rage de vivre" pour résister.

Transportons nous donc loin dans le passé, nous sommes quelques 50 ans avant JC et ....

La conquête de la Gaule par Jules César.

Les Nerviens occupent l'équivalent du Hainaut et du Brabant, les Morins et les Ménapiens sont sur le littoral, de
Boulogne à Knokke le Zout (environ), les Atrébates sont au centre.

Pour donner une idée, les frontières n'existant pas à cette époque, ni même avant la Révolution française, on peut
donner une grande idée en disant que l'on retrouve deux frontières naturelles, l'Escaut à l'est et L'yser et l' Aa à
l'ouest.

Les Morins et les Atrébates parleraient (au conditionnel), un dialecte celte.

Le littoral est beaucoup moins hospitalier qu'actuellement, c'est une zone de marécages, avec très peu de « villes ».
César va donc se focaliser essentiellement sur le centre et l'ouest.
Il doit être vrai que cette partie du Nord est beaucoup plus « intégrée » à la Pax romana et donc que l'on y parle latin,
ou un dialecte s'en approchant.

C'est la création de la Gallia Belgica, reprenant l'ensemble des territoires au nord de la Seine, qui durera de l'an 51
avant JC jusque vers 200 après JC.

Vers le III ième siècle la Gallia Belgica est divisée en 3 provinces, Belgica prima, Belgica secunda et Germanica
secunda .

C'est la Belgica secunda qui nous intéresse particulièrement. La métropole est Reims et elle inclut Soissons, Châlons
sur Marne, Tournai, Senlis, Beauvais, Amiens, Thérouanne, Boulogne sur Mer.
Les invasions des Saxons et des Francs, les Mérovingiens
Dès le début du Vième siècle, les invasions « barbares » déferlent sur la Belgica secunda .

Une explication à la frontière linguistique, mais une parmi d'autres, est de dire que le littoral étant moins peuplé et
moins romanisé, l'influence franque y a été plus importante, d'où l'émergence du flamand, issu des dialectes
germains. Le reste du pays étant plus peuplé et fortement romanisé, l'influence franque n'y a pas été suffisante et,
au contraire, ce sont les envahisseurs qui ont reçu la culture existante, et se sont romanisé, et surtout pris le latin
comme langue.

C'est de Tournai que Chilpéric, puis Clovis, son fils, vont étendre leur influence sur la majeure partie de la France
actuelle. A la mort de Clovis, le royaume franc est divisé et le nord est rattaché à la Neustrie, capitale Soissons,
avec Clotaire 1er.

Les Carolingiens

Tout le monde connaît Charles Martel et Pépin le Bref qui sont ceux qui vont refaire l'unité de l'ensemble du
royaume franc ce qui donne Charlemagne, fils de l'un et petit fils de l'autre, couronné empereur.

A la mort de Charlemagne, un partage est fait entre ses fils, et la frontière est à nouveau matérialisée par l'Escaut.
L'est est rattaché à la Lotharingie (grosso-modo, l'Allemagne + le Luxembourg ) commandée par Lotaire, l'ouest est
donnée à Charles le Chauve.

Aux provinces romaines, avaient succédées sous les carolingiens, les pagi, administrées par un Comte. On retrouve
des noms qui nous sont parvenus pour la plupart, l'Artois, le Ternois, le Boulonnais, l'Ostrevent, le Tournaisis, le
Mélantois.

Les premiers comtes de Flandres, Bauduin Bras de Fer

Tout commence par un enlèvement digne des grandes histoires romanesques. En 863 Bauduin est à la cours de
comtale de Laon en même temps que Judith, la fille du roi, et, ses 20 ans, et son expérience déjà de deux mariages,
eurent raison de Bras de Fer, qui . l'enleva et se réfugia en Lotharingie.

Après l'intervention du Pape, le roi finit par admettre cette idylle et remit à Bauduin plusieurs pagi qui formèrent le
pagus flandrensis.

Je passerais les diverses petites histoires d'invasions normandes, de coup de force de Bauduin II sur différents
territoires, Artois par exemple, du réveil royale, lui reprenant le même Artois, qui fut bientôt repris par Arnoul 1er,
rendu ensuite au roi de France contre protection, etc .

A cette époque, vers 900/920, le pagus Flandre va de la mer du Nord à l' Escaut et à la Canche.

C'est sous Bauduin IV et Bauduin V que naissent les Chastellenies créées essentiellement pour restreindre les
pouvoirs des différentes seigneuries.

Grâce à un mariage entre Bauduin V et Richilde, fille de Régnier V qui venait de réunir le Hainaut sous son autorité,
le Hainaut est rattaché sous la houlette de Bauduin VI. Cela dura jusqu 'à la mort de Marguerite de Flandre en
1246, où Saint Louis donna la Flandre à Guy de Dampierre et le Hainaut à Jean d'Avesnes, ses fils.

Fin du 1er épisode.
Pour ceux que ça intéresse, la suite bientôt, et je vous promet encore de belles batailles, des alliances qui se font
pour mieux se défaire, des traitrises et des attaques sans déclaration de guerre, enfin tout ce qui a
fait notre région.


From: "Bertrand Crépel"
Sent: Tuesday, October 09, 2001 11:08 PM
Re: [rech-59] Re : limite linguistique flamande

Jadis, on parlait le flamand sur la région entre Hazebrouck et Dunkerque (dans certains villages, il en reste quelques
traces, et ma grand-mère qui a vécu quelques années sur Outtersteene près de Bailleul entendait ses grands-
parents parler le flamand à table), mais les Lillois, bien que flamands, n'ont jamais parlé autre chose que le patois
"tournaisien" déformation du patois picard.
Si un temps, certains Lillois ont parlé un "ersatz" de flamand c'est seulement pour montrer leur mécontentement
quant à leur annexion à la France fin 17ème. C'est bien d'ailleurs à cause de cela que la citadelle fut construite hors
la ville, les Français étant mal vus à Lille encore début 18ème siècle


From: "Catherine Virion-Théry"
Sent: Wednesday, October 10, 2001 6:43 AM
Re: [rech-59] Re : limite linguistique flamande

Merci de la rectification. Mon grand-père paternel, lillois, parlait flamand mais il venait de Merris. Mes grands-oncles
parlaient tous flamand et deux de mes oncles le parlent encore mais, eux, l'ont appris au collège de Cassel lors de
leur scolarité.



From: "Patrick Clarisse"
Sent: Thursday, October 11, 2001 8:38 AM
[rech-59] Re : limite linguistique flamande

Ceci nous ramène à cette question : Quelle langue parlaient nos ancêtres ?

Et la réponse est difficile à donner car les réponses varient beaucoup en fonction des lieux, des époques et des
niveaux sociaux des personnes concernées

Il existe de fait une très ancienne frontière linguistique qui - grosso modo - suit une ligne horizontale allant de Liège à
Boulogne en passant par Mouscron et qui correspond (en Belgique et à quelque chose près) à la frontière
linguistique actuelle. Ce tracé fut sans doute plus septentrional à l'origine et marquait les limites - non pas des
conquêtes - mais de la pénétration de l'influence romaine.

Au sud de cette ligne, on parle durant des siècles, non pas un français qui n'existe pas encore, mais différents patois
romans d'origine latine : Wallon, Picard et leurs variantes régionales et locales (dialectes d'oïl).

Au nord, on parle différents patois d'origine germanique plus ou moins influencés par le latin et les parlers romans
voisins dès que l'on se rapproche de la frontière. Tout le petit peuple de la Flandre maritime française parlait
naguère un patois flamand... Reste que là, comme dans la Flandre belge, la bourgeoisie s'exprimait par contre en
français (ce qui suppose qu'ils étaient tous bilingues). Dans les bourgs et les campagnes, cette situation prévalait
encore dans les années trente.

|De part et d'autre de la frontière et jusqu'au XVIe siècle, les lettrés communiquent en latin, les nobles et les
bourgeois utilisent - en même temps que le patois local - la langue du parler courant la cour dont ils dépendent :
Flandre, Bourgogne, France, etc... Pour le reste, la langue vulgaire, on assiste à un compartimentage qui se
superpose au morcellement féodal

Après Villers Cotteret, le français remplace peu à peu le latin comme langue de communication et l'écriture se fait en
français en suivant (voire en précédant) les différentes conquêtes et agrandissements du royaume

Par ailleurs, la masse du peuple a continué à s'exprimer en patois dans son parler quotidien jusqu'à la fin du XIXe
siècle et parfois même après... Souvent, des expressions empruntés aux patois flamand ou wallon ont continué à
émailler la langue familière

Et en tout état de cause, nous serions vraisemblablement incapables aujourd'hui de comprendre la langue
quotidienne de nos trisaieux...
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